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Quel avenir pour la chirurgie orthopédique pédiatrique ? [Olivier Badelon]
La chirurgie orthopédique pédiatrique est la quintescence de la vocation qui m’a poussé à la choisir pour permette à des enfants de vivre le plus normalement possible tout au long de leur vie, en donnant la priorité au potentiel des phénomènes de croissance et aux possibilités de la biomécanique, bien avant les progrès techniques car la chirurgie n’est pas une finalité mais un moyen quand il n’est pas possible de faire autrement.
Elle porte en son nom la naissance de l’Orthopédie et c’est d’une certaine façon un pléonasme.
Il faut reconnaître qu’elle est le parent pauvre de la chirurgie orthopédique car elle n’a pas les mêmes liens avec le monde industriel et notre chiffre d’affaires est sans comparaison avec celui des chirurgiens d’adulte, et même de ceux qui ont choisi d’être des spécialistes d’appareil avec une activité mixte où l’activité pédiatrique est souvent minimale.
Notre influence dans l’organisation de notre système de soins est quasiment nulle même si nous sommes présents dans toutes les instances scientifiques car nous sommes peu nombreux.
Pourtant les besoins n’ont jamais été aussi criant alors que toute l’attention se porte à juste titre vers le vieillissement de la population.
Nous cumulons les inconvénients de notre système de soins et de la valorisation de notre activité, pourtant je suis persuadé que nous avons un potentiel de développement en offrant des carrières aux plus jeunes, et même l’opportunité de servir d’exemple en créant un véritable réseau de soins où les traitements précoces, la prévention et l’éducation seraient de vraies priorités, tout ceci avec la participation des plus anciens en fin de carrière, aussi bien hospitaliers que libéraux.
Une spécialité comme la nôtre ne peut pas avoir un avenir essentiellement hospitalier, en particulier hospitalo-universitaire. Il faut absolument qu’elle s’investisse aussi en libéral ce qui suppose un partage intelligent de l’activité avec une multiplication des carrières mixtes hospitalières et libérales et des passages d’un monde à l’autre, aussi bien au début qu’à la fin, ce qui n’enlèvera rien à la prépondérance du système hospitalo-universitaire, bien au contraire, en offrant même des possibilités de carrières prolongées pour ceux qui le désirent.
1/ Reconnaissance de notre spécialité en tant que telle par la CPAM : Pourquoi?
En pratique la chirurgie orthopédique pédiatrique est une vraie spécialité pourtant elle n’est pas reconnue par la CPAM qui ne connait que la chirurgie orthopédique et traumatologique et la chirurgie pédiatrique, et pour les plus anciens d’entre nous la chirurgie générale avec des compétences à la fois en chirurgie pédiatrique et en chirurgie orthopédique, pourtant nous avons une activité bien spécifique demandant une formation et une pratique régulière pour être vraiment compétent.
Cela est très important car la CPAM ne connait que les spécialités officielles et elle ne peut pas analyser notre activité de façon objective.
Cela n’a pas vraiment d’importance pour l’activité des services dans les CHU, par contre cela est important pour les services dans les CHG et encore plus en libéral.
Pour le moment cela n’est pas une priorité pour ceux qui nous représentent sur le plan syndical car nous sommes minoritaires à la SOFCOT et la chirurgie pédiatrique veut nous garder pour pouvoir faire de la traumatologie en libéral et dans les CHU pour mieux nous contrôler.
Il faut avoir vécu l’opposition de certains chirurgiens orthopédistes, de peur de perdre les quelques enfants qu’ils opèrent avec parfois des indications chirurgicales excessives alors que leurs activités débordent avec un vieillissement de la population qui ne fera qu’augmenter. Ils ont souvent tendance à garder pour eux les adolescents chirurgicaux pour nous confier surtout les pathologies non chirurgicales qu’ils connaissent mal et surtout qui sont moins rentables pour eux.
Un vrai partage d’activité serait beaucoup plus sain pour des raisons de compétence en sachant que nous leur confions plus de patients potentiellement chirurgicaux que l’inverse.
2/ Recrutement des jeunes en activité mixte hospitalière et libérale : Intérêts aussi bien pour les services hospitaliers que pour les carrières
2.1 – En pratique, les services hospitaliers sont de plus en plus surchargés pour de nombreuses raisons, structurelles car l’administration hospitalière prépondérante depuis la loi HPST donne la priorité aux activités les plus rentables et la législation du travail à l’hôpital a transformé les habitudes des médecins et de fait leur disponibilité, mais aussi probablement surtout conjoncturelles car les ARS ont limité de façon drastique la pratique chirurgicale pédiatrique dans les cliniques pour une raison sécuritaire, ce qui concerne surtout les anesthésistes qui paradoxalement continuent une activité ORL importante alors que le risque opératoire n’est pas moindre.
Il faut rappeler que dans les années 1990-2000, plus de la moitié de l’activité chirurgicale pédiatrique était faite en clinique.
Les conditions administratives ont bien changées et notre activité est encore possible en libéral seulement dans des établissements ayant une activité pédiatrique importante, c’est-à-dire seulement dans des métropoles ayant un bassin de recrutement important car cela est quasiment impossible ailleurs, avec une aggravation de ce déséquilibre qui atteint toutes les régions de France, et même la région parisienne, en parallèle avec la paupérisation de notre offre de soins, les « déserts médicaux » touchant la France entière.
2.2 – L’augmentation du nombre d’annonces de recherche de candidatures pour des postes de chef de clinique ou de praticien hospitalier montre bien les difficultés de recrutement qui sont compréhensibles pour des raisons tout simplement financières car notre chiffre d’affaires est bien moindre que celui d’un chirurgien d’adulte alors que nous avons une assurance professionnelle au plafond à cause du risque assurantiel lié à notre activité pédiatrique, en particulier pour la chirurgie du rachis.
La demande est encore plus criante en libéral car nous sommes trop peu nombreux en dehors des grandes métropoles.
Personnellement j’ai ouvert une consultation exclusive à Vannes il y a douze ans pour me glisser dans le tissu social de ce pays que j’aime depuis ma naissance et où je terminerai ma vie dans ma famille bretonne.
Je voulais combler une absence totale en libéral dans cette région en travaillant avec les chirurgiens locaux et les CHU de Rennes, de Nantes et de Brest. Je me suis rendu compte récemment que j’étais le seul dans toute la Bretagne. Cherchez l’erreur !
2.3 - Du côté des patients le service rendu est de plus en plus critiquable malgré l’excellence des services hospitaliers, notamment en consultations faites souvent par des internes considérés comme des étudiants et par le renouvellement rapide des intervenants qui complique les relations de confiance indispensable à une bonne prise en charge.
2.4 – Paradoxalement les possibilités de recrutement en libéral n’ont jamais été aussi favorables grâce à l’utilisation des réseaux, en particulier des systèmes de prise de rendez-vous comme Doctolib qui permettent aux parents de trouver des rendez-vous de consultation plus rapidement alors que les délais à l’hôpital public sont souvent de plusieurs mois.
2.5 – Il est possible d’envisager une autre organisation avec un vrai partage d’activité entre l’Hôpital public et l’activité libérale extrahospitalière au bénéfice de tous, des patients, des hospitaliers et des libéraux.
Il ne s’agit pas de partager l’activité de façon, soit-disante, complémentaire en gardant un mur d’incompréhension entre deux mondes en compétition qui ne se comprennent pas car il ne se connaissent pas.
Il n’est pas question de revenir aux simples vacataires d’autrefois mais de multiplier les postes de temps partiels avec une activité hospitalière de 30 à 50%.
Les avantages sont nombreux :
- Pour les services hospitaliers, avoir dans l’équipe des chirurgiens compétents qui apportent des patients chirurgicaux complexes, qui assurent un suivi à long terme au sein de services et qui peuvent participer à la formation des plus jeunes en leur offrant des possibilités de carrières en dehors de l’Hôpital ;
- Pour les praticiens à temps partiel, avoir le confort d’une équipe soudée et polyvalente avec une permanence des soins, avoir une sécurité dans la prise en charge des cas les plus difficiles, pouvoir traiter soi-même une éventuelle complication chirurgicale en l’hospitalisant la continuité de la prise en charge étant la meilleure garantie de conserver la confiance de la famille donc éviter des plaintes, permettre une perméabilité sociale entre le libéral et le public ;
- Poussé à l’extrême c’est aussi la possibilité d’avoir une activité de consultation exclusive en libéral ou en salarié en dehors de l’Hôpital et chirurgicale à l’Hôpital, avec un confort de vie beaucoup plus calme grâce à la prise en charge collective dans les services hospitaliers et une diminution considérable des charges, notamment de l’Assurance RCP qui est dans un rapport de 1/10 entre le libéral extra-hospitalier et l’activité chirurgicale hospitalière, ce dont bénéficient déjà les hospitaliers qui ont une activité libérale au sein de leur service avec une activité privée en consultation et publique pour la chirurgie.
Le préalable est bien sûr un respect dans l’esprit d’équipe et dans la charge de travail de la part des temps partiels et inversement un respect des hospitaliers temps plein pour leurs personnes et leurs patients, en évitant les excès qui peuvent être favorisés par le système hégémonique actuel.
Une telle organisation ne viendrait absolument pas en compétition avec l’activité des hospitaliers temps plein quel que soit leur statut, cela rendrait même plus fluide les carrières hospitalières aussi bien au début qu’à la fin, car les hospitaliers qui n’ont plus leur place dans le système public au-delà de 68 ans, 72 ans pour ceux qui s’entendent bien avec leur direction, pourraient ainsi continuer en libéral en collaboration avec leurs élèves dont ils ont su s’entourer en bonne intelligence.
3/ Propositions aux chefs de clinique d'assister à des consultations en dehors du secteur hospitalier
Dans cette conception d’une véritable complémentarité entre l’hôpital public et l’activité libérale en dehors de l’Hôpital, il faudrait proposer sur la base du volontariat, la possibilité aux plus jeunes d’assister aux consultations des plus anciens, ce qui se faisait autrefois au sein des services hospitaliers.
Personnellement j’ai beaucoup appris en observant mes patrons pendant mon internat et en faisant un véritable tour de France de compagnon pendant mon clinicat, à Lille, à Montpellier, à Tours, à Marseille, à Lyon.
Cela devrait être continué à la fois dans un objectif de découverte et de formation car la pratique libérale est souvent bien différente de l’activité hospitalière, et éventuellement de collaboration progressive pour la préparation d’installations futures.
À ce titre je suis prêt à recevoir des jeunes en formation aussi bien à Neuilly sur Seine pour les parisiens qu’à Vannes pour les bretons.
4/ Offres de soins régionales avec participation des plus anciens en cumul emploi-retraite
Les besoins en dehors des métropoles sont considérables avec une variable à l’offre des soins qui est le transport, très préjudiciable aux campagnes reculées et aux vallées montagneuses.
Chacun d’entre nous peut prolonger sa carrière au-delà de l’âge de la retraite, sans véritable limite pour les libéraux sans activité hospitalière car ils choisissent eux-mêmes la date de leur retraite, en cumul emploi-retraite pour tous les hospitaliers avec une limite obligatoire à 65 ans, prolongée à la 68ème année de façon statutaire pour ceux qui ont eu trois enfants et qui le demande, et même 72 ans à condition que le directeur de l’hôpital et le chef de service soient demandeurs, ce qui suppose une demande express de ce dernier car l’administration a tout intérêt à recruter un jeune en début de carrière pour des raisons de coût et de statuts.
Certains voudront profiter d’une retraite complète, d’autres ont besoin de travailler pour continuer à assurer un certain train de vie, d’autres encore voudront continuer leur activité tout simplement pour continuer à rendre service avec leur expérience acquise.
Ayant été interne dans le service de Pierre Rigault à l’Hôpital Necker Enfants Malades j’ai eu l’occasion de l’accompagner au Centre Hélio-marin de Roscoff où il avait organisé avec Jean-Paul Padovani une véritable activité chirurgicale.
Lors de mes échanges de chef de clinique, j’ai observé l’organisation de Alain Diméglio au Centre Hélio-marin de Palavas des Flots.
L’époque où il était possible d’avoir une activité chirurgicale dans ces centres est révolue. Ils sont devenus des centres de Réadaptation avec des médecins de rééducation fonctionnelle et des pédiatres et quelques vacations ponctuelles pour des chirurgiens hospitaliers qui leur confient leurs opérés pour les suites opératoires.
Sans vouloir dévaluer leur prise en charge elle n’est pas orientée vers la population générale pour les pathologies les plus courantes, leur intérêt étant surtout de générer des hospitalisations plutôt que des consultations externes.
Par ailleurs la chirurgie orthopédique pédiatrique a été récemment interdite par l’ARS de Bretagne, et probablement ailleurs, dans le réseau des cliniques en dehors de la traumatologie urgente.
Il existe donc un champ d’activité considérable pour l’activité de consultation non chirurgicale avec la possibilité de traiter en amont les pathologies courantes et d’orienter les enfants qui le justifient vers les hôpitaux régionaux CHR et CHU ayant des services de chirurgie pédiatriques.
Les consultants qui se consacreraient à une telle activité pourraient être des jeunes ayant choisi la carrière de PHTP dans les services hospitaliers et des anciens en fin de carrière, en particulier en cumul emploi-retraite, les anciens pouvant même encadrer les plus jeunes et avoir des actions de prévention et de formation dans leur région d’activité.
Personnellement, j’ai commencé à consulter à Vannes il y a douze ans pour combler un désert médical complet de notre spécialité dans le Morbihan et je me suis même rendu compte récemment que je suis le seul consultant libéral en dehors de l’Hôpital dans toute la Bretagne.
Je suis accueilli gracieusement dans un cabinet de chirurgiens orthopédistes adultes qui sont très heureux que je prenne en charge les enfants dont ils connaissent mal les pathologies et qui ne débouchent pas sur une activité chirurgicale.
J’ai choisi ce lieu car je suis voisin de PROTEOR-Vannes ce qui me permet de traiter les déformations du rachis et du thorax comme en région parisienne.
Je confie les enfants justifiant une hospitalisation aux CHU de Rennes, de Nantes ou de Brest selon leur lieu d’habitation.
Mes honoraires sont adaptés aux conditions locales et tous mes frais de transport sont comptabilisés dans mes frais professionnels.
Je pourrai certainement augmenter l’activité de consultation en étant secondé par des plus jeunes s’ils pouvaient être PHTP car une activité chirurgicale est impossible actuellement et je doute que cela puisse être possible dans un avenir proche à cause de l’ARS.
Je sais que d’autres anciens ont une activité comparable, notamment Alain Dimeglio qui m’a même précédé avec une activité de soins, de prévention et d’éducation tout autour de Montpellier qui mérite d’être connue car elle est exemplaire, et bien sûr reproduite.
Si vous voulez concrétiser l’existence d’un vrai réseau national en chirurgie orthopédique pédiatrique en donnant aux libéraux leur juste place, en particulier en privilégiant les postes de PHTP dans les services hospitaliers, je vous offre le nom d’Institut d’Orthopédie Pédiatrique qui pourrait être une section de la SOFOP.
Je suis prêt à y travailler avec vous en collaboration directe avec Alain Dimeglio avec qui je partage depuis très longtemps.
J’ai protégé ce nom à l’INPI au moment de l’ouverture de mes deux nouveaux lieux de consultation à Neuilly sur Seine et à la Trinité sur Mer. Je suis prêt à vous l’offrir gracieusement.
Olivier Badelon
• Ancien PH puis PHTP à l’Hôpital Robert Debré, Paris
• Spécialisé en chirurgie générale et compétent en chirurgie pédiatrique et en chirurgie orthopédique et traumatologique
• Retraité en cumul emploi-retraite depuis 2018 avec une activité exclusive de consultation depuis trois ans, partagée entre la région parisienne et le Morbihan pour combler un désert médical de notre spécialité
• Adresse professionnelle principale : Institut d’Orthopédie pédiatrique - 8 rue Louis Philippe -92200 Neuilly sur Seine
• Adresses secondaires : UCOS - 10 rue du Docteur Joseph Audic - 56000 VANNES et 38 rue des Frères Kermorvant – 56470 La Trinité sur Mer
NB : Ce texte est transmis au secrétariat de la SOFOP pour qu’il puisse être envoyé par email à tous ses membres afin d’être discuté lors de la prochaine AG pendant le congrès annuel de la SOFCOT en Novembre 2025, ce qui permettrait de gagner du temps. Si la discussion demande une prolongation il pourra faire l’objet d’un futur colloque avec des participants hospitaliers et libéraux.
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